Dégât des eaux dans votre appartement : décryptage de vos droits

Comment obtenir réparation de vos préjudices résultant d'un sinistre dégât des eaux ?

Un dégât des eaux dans votre appartement ? Cette situation, malheureusement très fréquente, est le premier sinistre déclaré dans les logements français. Rassurez-vous, des solutions existent et vous n'êtes pas seul face à cette épreuve. Qu'il s'agisse d'une fuite chez vous ou chez votre voisin, d'une canalisation qui a lâché, il est essentiel de connaître vos droits et les démarches à suivre pour obtenir réparation de vos préjudices.

Dans cet article, je vous guide pas à pas, de la gestion de l'urgence jusqu'à l'indemnisation. Mon objectif ? Vous donner toutes les clés pour gérer sereinement cette situation stressante.

Les premiers réflexes : sécuriser et limiter les dégâts

Ce qu'il faut absolument faire

Une fois l'urgence maîtrisée :

-       identification de l’origine de la fuite,

-       coupure d’’arrivée d’eau,

pensez à documenter la situation.

Prenez des photos et des vidéos : photographiez l'ensemble des dégâts sous tous les angles. Ces éléments visuels seront précieux pour votre déclaration et constitueront des preuves irréfutables de l'étendue des dommages.

Faites intervenir un plombier : pour stopper définitivement la fuite, l'intervention d'un professionnel peut être nécessaire. Conservez la facture, elle pourrait être prise en charge par votre assurance.

Ce qu'il ne faut surtout pas faire

Certaines erreurs peuvent compromettre votre indemnisation :

Ne commencez pas les travaux : attendez l'accord de votre assureur avant d'entreprendre les travaux de remise en état. Des réparations prématurées peuvent compliquer l'expertise et réduire votre indemnisation.

Les démarches déclaratives : qui prévenir et dans quels délais ?

La déclaration rapide de votre sinistre est cruciale. Voici qui contacter et comment procéder.

Les personnes à informer

Plusieurs interlocuteurs doivent être prévenus selon votre situation :

Votre assureur : c'est votre interlocuteur principal. La déclaration doit être effectuée dans les meilleurs délais, au plus tard dans les 5 jours de la survenance du sinistre (selon la loi, police d’assurance ne peut stipuler un délai inférieur à 5 jours, le contrat peut prévoir un délai plus long).

Le propriétaire si vous êtes locataire : informez rapidement votre bailleur du sinistre, même si celui-ci ne provient pas de votre fait. Cette démarche est essentielle pour préserver vos relations locatives et respecter vos obligations contractuelles.

Le syndic de copropriété : si l'origine du sinistre concerne les parties communes (canalisation collective, toiture, gouttière), ou si plusieurs lots sont touchés, le syndic doit être informé.

Le ou les voisins impliqués : si la fuite provient d'un appartement voisin ou si votre sinistre a causé des dommages chez d'autres occupants de l'immeuble, prévenez-les rapidement pour établir ensemble le constat amiable.

Le constat amiable de dégât des eaux

Le constat amiable est un document essentiel qui facilite grandement le traitement de votre dossier. Il s'agit d'un formulaire standardisé, disponible auprès de votre assureur ou téléchargeable sur Internet.

Contenu du constat : le document doit comporter les coordonnées complètes de tous les occupants concernés (noms, adresses, numéros de téléphone), leurs assureurs respectifs (nom de la compagnie et numéro de contrat), une description précise des circonstances du sinistre (date, heure, origine de la fuite), et un descriptif des dégâts constatés dans chaque logement.

Remplissage en commun : idéalement, le constat doit être rempli et signé par toutes les parties concernées.

Que faire si le voisin refuse de signer ? : ne paniquez pas. L'absence de signature du voisin ne bloque pas votre indemnisation. Remplissez votre partie du constat, notez le refus du voisin et transmettez le document à votre assureur. Vous pouvez également envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception à votre voisin pour formaliser votre demande.

En dernier recours, l'intervention d'un commissaire de justice (huissier) peut s'avérer nécessaire pour constater les dommages et la prise de position du voisin.

La déclaration à l'assureur

La déclaration à votre compagnie d'assurance doit être effectuée rapidement, au plus tard dans les 5 jours de la survenance du sinistre, de manière complète.

Modalités de déclaration : vous pouvez déclarer votre sinistre par lettre recommandée avec accusé de réception (la méthode la plus sûre pour conserver une preuve), par déclaration en ligne via votre espace client sur le site de votre assureur, ou par téléphone (demandez toujours un numéro de dossier et confirmez par écrit).

Informations à fournir : votre déclaration doit comporter vos coordonnées complètes, votre numéro de contrat d'assurance, la date et l'heure du sinistre (ou de sa découverte), une description détaillée des circonstances, l'origine de la fuite si elle est connue, et une liste des dommages constatés.

Documents à joindre : accompagnez votre déclaration du constat amiable dûment complété, de photos et vidéos des dégâts, des factures de dépannage (plombier, électricien), et de tout document utile (attestation du syndic, témoignages).

Comprendre votre couverture d'assurance

Avant de vous lancer dans les démarches, il est essentiel de bien comprendre ce que couvre votre assurance habitation en matière de dégâts des eaux.

La garantie dégâts des eaux : ce qu'elle couvre

La garantie dégâts des eaux est systématiquement incluse dans tous les contrats d'assurance multirisques habitation, qu'il s'agisse d'un contrat pour locataire, propriétaire occupant ou propriétaire non occupant.

Types de dégâts couverts : sont généralement pris en charge les fuites d'eau provenant de canalisations (rupture, fissure), les débordements (évier, baignoire, machine à laver), les infiltrations d'eau accidentelles (à condition qu'elles ne résultent pas d'un défaut d'entretien), les ruptures d'appareils contenant de l'eau (chauffe-eau, aquarium), et le gel des canalisations.

Dommages matériels couverts : la garantie prend en charge les dommages mobiliers (meubles, électroménager, objets personnels, vêtements) et les dommages immobiliers (sols, murs, plafonds, revêtements, peintures). Si vous êtes locataire, votre assurance couvre vos biens personnels et les embellissements que vous avez réalisés. Si vous êtes propriétaire, votre assurance couvre l'ensemble des éléments immobiliers de votre bien.

Les exclusions à connaître

Tous les dégâts liés à l'eau ne sont pas systématiquement couverts. Voici les principales exclusions :

Humidité et condensation : les problèmes d'humidité dus à un défaut d'aération ou de ventilation, sans événement soudain, ne sont généralement pas pris en charge.

Défaut d'entretien et vétusté : si les dégâts résultent d'un manque d'entretien caractérisé (canalisation non entretenue, toiture non réparée malgré des signes de détérioration), l'assureur peut refuser sa garantie ou réduire fortement l'indemnisation.

Infiltrations récurrentes : les infiltrations chroniques qui auraient pu être évitées par un entretien normal du bien sont souvent exclues de la garantie.

Frais de réparation de l'origine du sinistre : votre assurance prend en charge les conséquences du dégât des eaux, mais pas nécessairement la réparation de l'appareil ou de l'installation défectueuse à l'origine de la fuite. Par exemple, si votre machine à laver est en cause, le remplacement de celle-ci ne sera pas forcément couvert.

La question de la responsabilité

Déterminer qui est responsable du sinistre est essentiel, car cela influence directement les modalités d'indemnisation.

Locataire responsable : le locataire est généralement responsable lorsque le sinistre résulte d'une négligence de sa part (robinet mal fermé, surveillance insuffisante d'un appareil, absence de précaution), d'un défaut d'entretien courant qui lui incombe (joints non changés, entretien des équipements), ou d'un fait personnel (mauvaise manipulation d'un appareil).

Propriétaire responsable : le propriétaire est responsable dans les cas de vétusté des installations (canalisations anciennes, toiture défaillante), de vices de construction ou de malfaçons, de canalisations encastrées dans les murs ou les sols, ou de tout équipement dont l'entretien lui incombe.

Copropriété responsable : la copropriété, via son assurance collective, est responsable lorsque l'origine du sinistre se situe dans les parties communes (canalisation collective, toiture, gouttières), ou lorsqu'il s'agit d'un équipement commun (système de chauffage collectif, antenne).

Voisin responsable : si la fuite provient du logement d'un voisin (tuyau qui cède, appareil défectueux, robinet laissé ouvert), celui-ci engage sa responsabilité et son assurance doit prendre en charge les dégâts causés aux autres appartements.

Cas particulier : le voisin non assuré

Que se passe-t-il si le responsable du sinistre n'a pas souscrit d'assurance habitation ?

Prise en charge initiale : votre propre assurance prendra en charge vos dommages dans un premier temps, même si le responsable n'est pas assuré. C'est l'un des avantages du contrat multirisques habitation.

Recours contre le voisin : dans un second temps, votre assureur exercera un recours contre le voisin non assuré pour récupérer les sommes versées. Le voisin devra alors rembourser directement ces montants à la compagnie d'assurance.

Garantie protection juridique : si votre contrat comporte une garantie protection juridique, celle-ci peut s'avérer précieuse pour gérer les aspects contentieux de la situation, notamment si le voisin refuse de reconnaître sa responsabilité ou de payer.

La convention IRSI : simplifier l'indemnisation en copropriété

Qu'est-ce que la convention IRSI ?

La convention IRSI (convention d'Indemnisation et de Recours des Sinistres Immeubles) est entrée en vigueur le 1er juin 2018, remplaçant l'ancienne convention CIDRE. Elle a été mise en place par la Fédération Française de l'Assurance dans un objectif bien précis : simplifier et accélérer la gestion et le règlement des sinistres.

Les principaux avantages de la convention IRSI sont la désignation d'un assureur gestionnaire unique par sinistre, ce qui évite la multiplication des interlocuteurs, la simplification de l'évaluation des dommages avec une expertise pour compte commun, et l'accélération des procédures d'indemnisation grâce à des règles claires et des délais encadrés.

Les conditions d'application

La convention IRSI ne s'applique pas automatiquement à tous les sinistres. Plusieurs conditions doivent être réunies.

Pour que la convention IRSI s'applique, le montant des dommages matériels et des frais afférents par local sinistré ne doit pas excéder 5 000 €. Le sinistre doit mettre en cause au moins deux assureurs adhérents à la convention IRSI. L'origine du sinistre doit se situer dans l'immeuble concerné ou dans un immeuble voisin.

Les deux tranches d'indemnisation

La convention IRSI fonctionne selon un système de deux tranches, déterminées par le montant des dommages.

Tranche 1 : sinistres jusqu'à 1 600 € HT

Pour les sinistres dont le montant n'excède pas 1 600 € HT par local sinistré, l'assureur gestionnaire (généralement l'assureur de l'occupant du logement sinistré) prend en charge seul l'indemnisation, même s'il existe un tiers responsable.

Particularité importante : l'assureur gestionnaire n'a pas le droit de demander une quote-part aux autres assureurs, c'est-à-dire qu'il ne peut pas leur réclamer une participation financière au remboursement. Il s'agit d'un abandon total de recours entre assureurs pour simplifier et accélérer le traitement.

Tranche 2 : sinistres entre 1 601 € et 5 000 € HT

Pour les sinistres compris entre 1 601 € et 5 000 € HT, c'est l'assureur du propriétaire des biens endommagés qui devient l'assureur gestionnaire. Un unique expert est désigné pour évaluer les dégâts, et l'assureur gestionnaire peut ensuite solliciter une participation financière (quote-part) auprès des autres compagnies d'assurance impliquées.

Dans cette tranche, les recours entre assureurs restent donc possibles, mais ils sont simplifiés et encadrés par la convention.

L'indemnisation : comprendre vos droits

Une fois les démarches déclaratives effectuées, place à l'indemnisation. Voici comment celle-ci se déroule et comment protéger vos intérêts.

L'expertise des dommages

L'expertise est une étape clé dans le processus d'indemnisation.

Qui mandate l'expert ? : c'est généralement votre assureur, ou l'assureur gestionnaire dans le cadre de la convention IRSI, qui mandate l'expert. Dans le cas d'une expertise pour compte commun (tranche 2 de la convention IRSI), un seul expert intervient pour le compte de tous les assureurs impliqués.

Déroulement de l'expertise : l'expert prend rendez-vous avec vous pour visiter votre logement et constater les dégâts. Il examine les causes du sinistre, évalue l'étendue des dommages, et estime le coût des réparations. Il rédige ensuite un rapport d'expertise qui servira de base au calcul de votre indemnisation.

Votre droit à être présent : vous avez le droit, et même le devoir, d'être présent lors de l'expertise. C'est le moment pour vous de montrer tous les dégâts, d'expliquer les circonstances du sinistre, et de remettre à l'expert tous les documents utiles (factures d'achat des biens endommagés, devis de réparation).

Contre-expertise : si vous estimez que l'évaluation de l'expert ne reflète pas la réalité des dommages, vous pouvez faire appel à un expert d'assuré (contre-expert) qui défendra vos intérêts. Cette démarche est payante, mais peut s'avérer rentable si l'enjeu financier est important.

Le calcul de l'indemnisation

Comprendre comment votre indemnisation est calculée vous permet de mieux anticiper le montant que vous allez recevoir.

Base de calcul : l'indemnisation repose sur la valeur des biens endommagés au moment du sinistre, et sur le coût estimé des réparations pour les dommages immobiliers.

Plafonds de garantie : attention, votre contrat peut prévoir des plafonds d'indemnisation globaux ou par catégorie de biens (mobilier, équipements électroménagers, objets de valeur). Vérifiez ces plafonds dans vos conditions particulières pour éviter les mauvaises surprises.

La franchise : qui paie ?

La franchise est le montant qui reste à votre charge après le sinistre. Mais qui doit réellement la payer ?

Définition : la franchise est la somme qui reste à la charge de l'assuré à la suite d'un sinistre. Elle n'est donc pas remboursée par l'assureur.

Vous payez si vous êtes responsable : si le dégât des eaux provient de votre logement et que vous en êtes responsable (négligence, défaut d'entretien), la franchise prévue à votre contrat sera déduite de votre indemnisation.

Vous ne payez pas si un tiers est responsable : si le responsable du sinistre est un tiers identifié, l'assureur peut lui réclamer la totalité du montant versé. Le contrat peut alors prévoir que vous n'aurez pas de franchise à payer ou qu'elle vous sera remboursée.

Cas particulier de la convention IRSI : en tranche 1 (sinistres inférieurs à 1 600 € HT), dans la plupart des cas, aucune franchise ne vous est réclamée, sauf si vous êtes personnellement responsable du sinistre. En tranche 2, les règles habituelles de franchise s'appliquent.

Les délais d'indemnisation

Combien de temps devrez-vous attendre pour recevoir votre indemnisation ?

Délai légal : une fois que l'assureur a donné son accord sur le principe et le montant de l'indemnisation, il dispose généralement d'un mois pour vous verser les fonds.

Variable selon la complexité : les délais réels dépendent de la complexité du dossier. Un petit sinistre avec des responsabilités claires sera traité beaucoup plus rapidement qu'un sinistre impliquant plusieurs parties et nécessitant des expertises approfondies.

Plus rapide pour les petits sinistres : dans le cadre de la convention IRSI, les sinistres de moins de 1 600 € sont généralement traités beaucoup plus rapidement, parfois en quelques semaines seulement.


En tant qu’avocat en droit de la construction et de l’immobilier, inscrit au Barreau de Toulouse, je vous accompagne afin de préserver vos intérêts, dans le cadre d'un sinistre dégât des eaux.

Prendre contact avec Randy NUBERY

D'autres ressources faites pour vous

Toutes les ressources
Toutes les ressources
Prendre contact avec un avocat !

Que vous soyez particulier, professionnel du bâtiment, syndic ou assureur, le cabinet vous répond rapidement pour qualifier la situation, clarifier les enjeux et proposer une stratégie.